Nikko Torcita.
Inventeur des mini microscopes portatifs de Jeepneed. La rencontre se fait dans un fast food, ouvert dans un immense centre commercial. Chacune de ces rencontres est marquée par le lieu qui nous accueille. Ce sont eux qui choisissent l’endroit. Choix qui n’est jamais anodin. Comme si ils reflétaient une partie d’eux. Ces espaces, ils les aiment et s’y sentent bien. Parce que la nourriture est bonne, le café à leur goût, l’ambiance agréable, ou les banquettes confortables. Avec Danee, le café est vide et le thé chaud et amer. Avec Nikko, les French Fries huileuses sont à volonté et le bruit nous étourdit. Ces espaces sont à leur image : inattendus et riches.

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Si la biologie a l’air de se porter plutôt mal aux Philippines, l’exemple de Nikko Torcita montre qu’il n’en est pas de même concernant l’électronique. Et pourtant, il nous parle avec passion de toute l’étendue du hacking dans son pays. Quelques gorgées de ice-tea et French fries plus tard, il nous embarque à bord de sa «Batmobile» pour nous emmener dans son «Awesomelabs». A première vue, nous ne comprenons pas vraiment où l’on met les pieds. Un building ultra sécurisé, un espaces où travaille les uns sur les autres chimistes, designers, hackeurs développeurs…tous pour la même entreprise. Awesomelabs fait le pari d’être un laboratoire transdiscplinaire offrant des services à des entreprises et en même temps, ses employés expérimentent librement sur leurs propres projets.
Véritable bidouilleur en herbe, il nous montre ses dernières inventions: un microscope fabriqué à la découpeuse laser, une valise contenant tout le nécessaire électronique d’une salle de classe (ordinateur, microscope, rétroprojecteur, batterie..). Il a déjà testé son produit avec des écoles des régions reculées des Philippines. Au fur à mesure, qu’il nous fait visiter sa caverne d’Ali Baba, notre curiosité grandit. Et si les Philippines grouillaient de petits talents cachés comme lui?

 

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Tengal.
Le rendez vous est fixé au Café Isabel. Lieu magnifique. Architecture coloniale d’Inchochine. Je suis captivée par ces sublimes boiseries, les fresques au plafond et les minutieux carrelages au sol. La salle est sombre, très sombre, le temps au dehors est changeant. L’orage gronde. Autour de moi, les cafés sont fumants, sensation enivrante. L’odeur des grains moulus me transporte loin. Lorsque je glissais mes mains dans les sacs de grains du torréfacteur. Odeur âcre et suave, qui pique le fond de la gorge. Le café je ne le bois pas, je le déguste à l’odeur : celui qui est froid, celui que l’on vient de moudre, celui qui est trop corsé.

Tengal arrive. Autodidacte, passionnée par ce qui l’entoure, il nous emmène dans son monde. Tel un caméléon, il revêt tous les costumes : fermier urbain, organisateur de soirée, passionné de sport…Encyclopédie à coeur ouvert, il fait partie de ces personnes dont on boit les paroles.

Après cet entretien hors du temps, nous suivons Tengal jusqu’à chez lui. Je me perds dans les méandres de ce quartier résidentiel de Manille. Nous arrivons, la nuit est tombée sans que je m’en rende compte. Un grand jardin et des chiots. Des tous petits chiots blanc crème qui se faufilent entre nos pieds. Et puis, il y a cette incroyable maison remplie de bibelots et de portraits en tout genre. Ces habitations que l’on trouve dans tous les grandes villes. Lieux de transition qui appartiennent à tout le monde et en même temps à personne. Parce qu’au final, ce n’est pas le plus important. Ici il y a une toute autre effervescence, comme une éternelle rencontre.

 

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Le Polaroïd.
Pour immortaliser instantanément ces rencontres. Pas le droit à l’erreur. Alors on réfléchit vraiment à la photo que l’on veut prendre. Quel cadrage pour quelle histoire. Lorsque le cliché sort, c’est toujours l’émerveillement. Ce noir profond qui se transforme en image lorsque la lumière frôle la pellicule. Comme si ce qui allait apparaître était toujours une surprise.

 

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Gourmet Keso.
De toutes les petites maisons de bambou et de feuilles de bananier, il y en avait une que j’avais remarqué les premiers jours de mon arrivée. Elle se tient, là, comme un énorme champignon au milieu de la Grassroots Kitchen. C’est l’atelier de Paul et Edouard. A peine le seuil de la porte franchi qu’une sensation familière nous saisit. Comme une forte odeur de France, une odeur que je pensais perdue depuis notre départ. Malgré le décor, nous sommes bien dans une fromagerie.
Lorsqu’ils reçoivent le lait, Paul et Edouard ne savent pas depuis combien de jours il a été trait. Le fermier du village voisin qui les approvisionnent ne possède pas de réfrigérateur, alors le lait doit être vite transporté, très vite. Il arrive avec un niveau déjà élevé en bactéries. Mais quel est la concentration en bactéries? Certaines sont pathogènes et d’autres ne le sont pas pour l’homme. Aussitôt arrivé à l’atelier, le lait est pasteurisé dans un bain marie à 72°C pendant 15 secondes pour tuer les micro-organismes, puis mis au frais pour ralentir leur prolifération. La croissance microbienne est quantifiable grâce à un pH-mètre. Certaines bactéries caractéristiques au lait produisent de l’acide lactique à partir des sucres présents naturellement. En plus d’être non pathogènes, leur prolifération limite le développement d’autres bactéries potentiellement pathogènes. Plus il y a de bactéries lactiques, plus le lait devient acide.
L’acidité du milieu provoque une dénaturation de la caséine (protéine majoritaire du lait) qui forme alors des agrégats (précipité): c’est l’étape de coagulation. Le fromage obtient ainsi sa matière. L’étape est déterminante pour la texture du fromage. La dénaturation de la caséine est réalisée dans la ferme par action enzymatique grâce à la présure : coagulant naturellement présent dans l’estomac des veaux. A l’issu de la coagulation, des herbes et du sel sont ajoutés pour aromatiser le fromage. La mise en pot est ensuite artisanale : les pots en verre sont chauffés et refroidis.
A cette étape du procédé, seul le lait et la texture du fromage déterminent son goût. A la ferme, le procédé s’arrête à la coagulation: seul du fromage frais est produit. L’étape d’affinage du fromage est quasi impraticable aux Philippines. Elle nécessite certaines conditions de températures et d’humidité.

Paul et Edouard viennent de lancer deux nouveaux produits: un lait aromatisé et du cream cheese. Pour ces deux nouvelles recettes, le lait pasteurisé passe une nuit au réfrigérateur. Le lendemain, la crème surnageante est récupérée et mélangée à du lait: ils obtiennent du cream cheese; le reste est repasteurisé, donnant du lait écrémé. Des arômes de café ou de chocolat sont ensuite ajoutés au lait écrémé.
Leurs petites bouteilles de laits au chocolat ou au café rencontrent un grand succès à la ferme. Le problème vient de la durée de vie de ces produits: pas plus de 4 jours. Paul et Edouard ne savent toujours pas pourquoi. Est-ce que cela vient du plastique non stérile des bouteilles?
Ils prennent conscience de l’exigence du packaging des produits et du choix des matériaux d’emballage. Il y a une interaction entre le contenant et son contenu. Elle influe sur le goût, sur la durée de vie de l’aliment. L’emballage se place entre le consommateur et l’aliment. Il doit posséder une certaine sensualité, une certaine odeur. Il est parfois la première chose qui rentre en contact avec les lèvres du consommateur.
Est-ce que cela vient du lait à l’origine? Je comprends l’intérêt d’identifier et de quantifier les composants du lait de départ. Par exemple, le taux de lymphocytes dans le lait reflète l’état de santé des vaches. Un test nutritif permettrait d’analyser le lait acheté dont la qualité est déterminée par la santé et le régime alimentaire des vaches. La qualité du lait est corrélée à sa teneur en protéines, lipides et glucides.

Pour fidéliser leurs clients, Paul et Edouard doivent obtenir de parfaits clones entre chacune de leurs productions. Mais comment passer d’une production artisanale à une production industrielle?

 

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Capiz.
Super Shuttle RORO. Immense ferry à la bouche béante par laquelle nous entrons. Deux niveaux et le pont. Dans la cale, des voitures s’entremêlent, au fond une pièce dans laquelle nous trouvons des lits superposés alignés. L’oppression me gagne. J’ai besoin d’air. Sur le pont, l’iode, le vent qui souffle, la mer à perte de vue. La peinture qui s’écaille sur les rambardes et l’odeur du pétrole tenace mêlé au sel marin. Apaisée, le sel colle ma peau et le soleil fait briller mes épaules. L’eau est d’huile, noire et profonde. A vrai dire je ne sais pas vraiment où je vais. Mais j’y vais, confiante comme toujours. Les heures passent. 22h de traversée. Le temps de refaire le monde et d’admirer. Admirer les couleurs, et la multitude de nuances. Le soleil disparaît emmenant avec lui les dégradés rosés, orangés et violacés. Les terres et les montagnes au loin sont comme des murs qui délimitent cet espace sans fin. Des corps couchés, des ombres et des formes qui se fondent avec le ciel qui s’assombrit. Celui même qui s’éclaire de mille feux. Au loin, des orages, des éclairs qui brisent l’atmosphère en deux. Impossible de quitter des yeux ce spectacle. Alors j’admire ce que m’offre le ciel. Un balai d’éclairs, imprévisibles, flous, puissants et insaisissables.

Elle s’assoit à côté de moi et allume une cigarette. Sa fumée m’enveloppe, le tabac me pique le nez. Je la regarde, elle observe notre groupe jouant aux cartes. Un sourire au coin des lèvres, je ne sais pas ce qui l’amuse. Notre attitude, nos mimiques, nos intonations. Elle ne comprend pas mais elle rigole. Je suis en dehors du groupe et je souris aussi. C’est vrai qu’ils sont drôles. Sans lui parler, nos yeux scintillent ensemble.

 

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A Capiz, l’accueil est chaleureux. A notre arrivée, les enceintes crachent de la musique, le village est animé. Aux premiers abords, difficile d’imaginer qu’un Typhon est passé par ici quelques mois plus tôt. Au fur à mesure que je pénètre dans le village, les traces de Yolanda se dévoilent peu à peu. La courbure des toits de taule n’épouse plus celle des maisons. Nous pouvons lire UNICEF sur les tentures. Un matelas d’eau posé au milieu du petit village alimente tous les besoins de la communauté. L’eau est rendue potable à l’aide de filtres fournis par des ONG.
Nous dormons sur des paillasses (:)) dans une grande salle de classe aux murs bleus. Elle possède des fenêtres sur tous les côtés. Les étagères de livres sont bien fournies. Je trouve des livres pour tout niveau, et toute sorte de matière. Le carrelage de la pièce est tiède. J’improvise un oreiller avec un petit sac de coton rempli de vêtements pendant que les filles disposent leurs sacs de randonnée tout autour des paillasses pour « se protéger des crapauds ». Cela nous fait rire. Mais derrière ce geste naïf se dissimule sans doute un besoin de délimiter, de marquer l’espace du sommeil ou du repos, synonyme de vulnérabilité.

 

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Le ciment et les briques.
Un village se construit au bord de cette route. Je ne suis pas experte en maçonnerie. Loin de là. J’observe et je reproduis. Dans la chaîne qui se constitue je saisis une pierre et la transmet à mon voisin. J’apprends. Préparation du ciment, pose du ciment puis des briques. Un fil à plomb tendu pour vérifier l’horizontalité du bâti. Pas besoin de plus. Le ciment est préparé comme un gâteau à même le sol : un puit au milieu duquel on verse des sceaux d’eau. Les pelles prennent le relai pour obtenir la pâte consistante et granuleuse.
Une cadence, un rythme. Chacun sa place et on avance. Dans les rires, la joie, le silence et la concentration.

 

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Le chef du chantier a un regard transperçant. Quelques fois, des sons sortent de sa bouche, des onomatopées mais jamais de mots. Pas besoin. Il force le respect et l’obéissance. Le noir l’enveloppe, de la tête au pied jusqu’au fond de ses yeux. Ses mains sont cuivrées, burinées par la tâche. Son visage est plissé par le soleil, ses traits sont autant de lignes qui écrivent sa vie. Mais je ne peux pas les lire. Juste les regarder.
Pierres après pierres, on construit des murs, des maisons, un projet, une amitié et sa vie.
Ici l’eau scintille. Le soleil se couche dans le jardin emportant avec lui l’effervescence de la journée.

 

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Altérité.
Pour se rendre dans cet autre village, on emprunte une route liquide. L’eau entoure ces maisons, et les familles qui y vivent. L’inaccessibilité du lieu le rend unique, magique, augmentant l’impression de voyeurisme lorsque je pose le pied sur la terre. Dans cette chapelle, il y a une centaine d’enfants, de tous âges. Certains bouches bées nous regardent entrer. Que voient-ils ? Q’imaginent-ils ? Très vite les flashs fusent de partout. Nous sommes mitraillés de part et d’autre. Je ne comprends pas. Ici, je ne suis plus uniquement moi. Je suis une image, je véhicule une culture, un imaginaire. Je transporte des rêves, et un monde fantasmé. C’est étrange. Je ne sais pas quelles sont leurs références. Par quoi sont elles véhiculées ?
Rosaline a 25 ans. Comme nous. Mais à côté d’elle il y a une toute petite fille aux cheveux courts avec des boucles d’oreille coccinelle. Rosaline cherche à savoir qui je suis et pourquoi je suis là, à côté d’elle. Les questions fusent plus vite que les photos. Quelle est ma vie? Puis elle saisit l’instant. Sur ce cliché, c’est un peu plus moi. Et il y autre chose qu’un écran entre elle et moi. Je ne la prend pas en photo.
Je rentre chez elle. Immédiatement elle quitte cette retenue. Rosaline est dans son élément et maîtrise la conversation. Je suis guidée, prise en charge dans son univers. Je suis assise dans son canapé et chacun des membres de la famille vient s’assoir les uns après les autres à côté de moi. Rosaline, face à nous, prend des clichés.

Lorsque je monte dans le bateau, je ne comprend pas vraiment ce qu’il vient de se passer. 2 heures. Deux heures durant lesquelles tout s’est passé à une vitesse incroyable. Mais où tout est décuplé. Les sentiments, les sensations et les émotions. Je me retourne, et je vois Rosaline. Elle sur la terre et moi sur l’eau, un dernier signe pour se dire au revoir. Impossible de tourner la tête et de regarder en avant. Sa silhouette finit par se retourner. C’est finit. Devant moi, l’eau à perte de vue.

Il y a ces moments où tout semble s’accorder parfaitement. Comme une musique que l’on écoute pour la première fois et que l’on aime parce que le rythme suit ce que l’on voudrait entendre. Ces instants où il n’existe plus de décalage.

 

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Le risque.
En route vers Kalibo, le van qui nous transporte cavale à une vitesse folle. J’ai l’impression qu’il donne tout ce qu’il a dans le ventre, et qu’à tout moment il va céder. Sa seule obsession : doubler tout ce qui bouge devant lui. Voitures, bus, motards, tricycles, camions, tracteurs, calèches, chiens. Pas de pitié, rien n’est épargné. A l’intérieur, personne n’est attaché. Ceinture de sécurité? Pas indispensable.
J’ouvre grand la fenêtre pour sentir le vent. Il est mon indicateur de vitesse. Mes cheveux qui auparavant serpentaient sur mon visage se mettent à claquer au rythme des rafales. Avec la vitesse tout est différent, toutes nos perceptions changent.
Une multitude d’odeurs se suivent et se juxtaposent. Fumée, essence, fumier, barbecue, dépotoirs. Il y en a certaines que je ne connais pas. J’arrive à percevoir le paysage qui défile les yeux fermés.
La vitesse masque tous les sons, mais les rugissements des moteurs persistent.
Je remarque qu’il est rare de voir une seule personne dans les voitures, les tricycles ou même sur les motos. On ne rivalise pas avec les philippins en matière de covoiturage. Je m’amuse à compter le nombre de personnes entassées dans les tricycles qui défilent. 2, 3, 4, 5….. jusqu’à 10 personnes!

L’orage.
Très souvent en fin de journée. Comme libérateur d’une pression qui s’accumule. Je l’attends avec impatience. Mais lorsqu’il éclate, je le redoute. La pluie s’abat à grosse gouttes, le ciel pleure. Puis il s’énerve, les éclairs fusent autour de moi. Et le laps de temps, avant que le tonnerre gronde, m’angoisse. Le ciel abat sa colère et je me cache comme une enfant honteuse. Pourtant, ici, les petits attrapent au vol les filets d’eau torrentiels. Le ciel ne les gronde pas, il joue avec eux. Les flaques se transforment en océan et les tonnerres en musique.

 

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Sheryn a les cheveux si noirs que les reflets sont bleus. Noir jais aux nuances infinies. Chaque couleur qui l’entoure est absorbée et reflétée. Sa coupe au carré et ses cheveux si raides contrastent avec la malice de son sourire. Elle nous observe. Se rapproche. Je griffonne sur mon carnet. Intriguée, elle s’assoit à côté de moi. Je lui dessine ma maison, ma famille, ma vie loin d’ici et elle fait de même. Un stylo dans la main, elle cherche continuellement à effacer son dessin et balaye de ses doigts des débris de gomme imaginaires. Nos mondes sont représentés là sur cette feuille et ils se ressemblent.

Tita Lili s’occupe des smoothies. Derrière son stand, entourée de son blender, fruits, et autres ustensiles elle prépare ces boissons avec délicatesse. Chaque geste est mesuré. Elle maîtrise sa technique et répète chaque mouvement comme une chorégraphie. Rien n’est gâché. Tout est maîtrisé. Alors je la regarde. Je l’observe, toujours en silence pour ne pas perturber sa danse. Mais malgré cette maîtrise, dans ses yeux, je plonge dans un océan de fragilité.
Toujours près d’elle il y a Cherrine, sa fille. Un large sourire qui illumine son visage. Un mélange de malice et de timidité.
Et le temps d’un instant, cette boisson fraîche me délivre de la chaleur moite et lourde de l’après-midi.

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Je dessine les visages, les attitudes et les regards. Les regards  pour percevoir autrement, pour mieux ressentir. Mais surtout pour mieux retranscrire une énergie, une émotion. J’aime les yeux, la sensibilité d’un regard et l’histoire qui s’y trouve. Saisir un instant. Au delà des mots, saisir ce qui n’est pas dit.

 

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Danee. Prénom à la consonance masculine. Assises à la table d’un café nous attendons un homme. Stéréotype du hacker, un peu geek, un peu bidouilleur :). Les clichés sont tenaces.
Pourtant c’est une tout autre espèce qui se présente à nous.
Tout d’abord Danee est une femme. Une très jeune femme. Dans un premier temps impossible de lui donner un âge. Pas très grande, elle porte une robe bleu et blanche. Le décalage me fait sourire. Qui est-elle ? Quelle est son histoire? Comment une femme portant une robe imprimée chiens/chats est-elle arrivée dans le monde des Hackers ? Face à elle, j’imagine qu’elle se dit la même chose de nous.
Assises à cette table, l’échange commence, naturellement, simplement.
Diplômée de Biochimie, elle nous explique qu’elle a passé quelques mois en Chine pour y passer son Master. Les HackersSpace elle connaît, elle est allée à leurs rencontres durant plusieurs mois aux Etats Unis : Côte est, Côte ouest, NoiseBridge, Genspace Brooklyn… Curieuse, sensibilisée et passionnée, elle veut voir ces mouvements naître chez elle, ici, à Manille.
Il y a deux ans, elle se lance, Manile BioPunk Movement voit le jour. Il vise à sensibiliser les Philippins sur les bases des Biotechnologies. Très vite, le mouvement s’essouffle : manque de collaboration, manque de projet fédérateur, manque d’unité. Je comprends rapidement qu’il semble fondamental ici d’unir les acteurs du mouvement autour d’un projet concret.

Pour la recherche aux Philippines elle rêve de liberté de penser, d’agir et de créer.
Elle dénonce un gâchis de cerveaux. Beaucoup de cerveaux mais peu d’innovation. La plupart, fraichement préparés par les universités, nourissent les grosses entreprises mais d’autres, comme le sien, finissent aux ordures. Son visage s’ouvre au fur et à mesure de la conversation.
Spontanée telle une enfant, les mimiques apparaissent. Sa main qui vient cacher ses sourires, son rire qui veut se faire discret mais qui éclate instinctivement entre deux mots.
Elle se souvient qu’en Chine, une semaine suffisait pour obtenir de la Taq polymérase (enzyme d’amplification d’ADN). A son retour aux Philippines, elle ne manipulait plus. Elle ne pouvait pas se le permettre. Trois semaines pour obtenir une polymérase, alors l’échec expérimental n’est pas permis. Danee se contentait d’envoyer les échantillons à l’étranger et de recevoir les résultats. Il n’existe pas de fournisseur de matériel biologique dans le pays. La plus grande université des Philippines empreinte sa PCR (machine à réplication d’ADN) aux Hôpitaux à qui la priorité est donnée. Les machines, rares, sont étiquetées et traquées. Quant aux séquenceurs d’ADN….pas l’ombre d’une trace dans toutes les Philippines. Mais pourquoi? Existe-t-il un lien entre l’absence totale de séquenceur et le contexte socio-culturel dans le pays?

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A la Ferme, nous rencontrons Shaina, co-fondatrice de « Jeepneed », petits laboratoires montés sur 3 roues. Dans la campagne philippine, ses « tuck-tuck » ambulants circulent d’école en école.
Dans sa valise se trouvent deux curieux objets. Ils tiennent dans la paume d’une petite main d’enfant. Ils ne ressemblent à rien que je connaisse. Ils ne pèsent presque rien. Le premier est constitué de deux petits cylindres reliés entre eux par une fine pièce métallique. Le second est une petite boite de plastique noir possédant 2 molettes.
Le point commun entre ces deux petits objets est la présence de deux lentilles de verres entourées de plastiques profilés. Comme si cela indiquait qu’il fallait regarder à l’intérieur. Mais quand on regarde à l’intérieur, il ne se passe rien. La lumière passe librement au travers. Mais si on approche la lentille d’un objet, d’une matière, d’une peau, de superbes motifs apparaissent. Rien ne l’indiquait, mais j’ai entre les mains deux petits microscopes.

 

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Ici on se déplace au  » p’tit bonheur la chance ».
On agrippe, grimpe, monte dans tout ce qui roule et qui nous frôle; jeepney, bus, tricycle … Pas d’arrêt de bus, ni de panneaux pour indiquer l’horaires des passages.

Une fois assise, je m’agrippe à une barre fixée au plafond. Le vrombissement du pot d’échappement. C’est parti. L’air chargé de la ville s’engouffre et je me laisse porter. Le chauffeur est seul maître à bord, il se faufile tel un expert entre les obstacles en tout genre.  » In God We trust » est ce que je peux lire à l’arrière de son siège. Rien ne l’arrête, il garde son calme en toute circonstance. Seul le bruit du klaxon trahit son exaspération.

 

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Le Jeepney est un des moyens de transport les plus utilisés ici. Abandonnés par l’armée américaine à la fin de la seconde guerre mondiale, ces jeepney sont aujourd’hui de redoutables voiture de course « pimpées » à souhait, flamboyantes. Le soleil brûle le chrome de la carrosserie.
À l’intérieur, je m’y sens bien, paradoxalement comme à l’abri du tumulte extérieur.
Malgré les embardées, les brusques coups de freins et la carlingue qui s’emballe, j’ai confiance.
Pour payer le conducteur, pas de ticket, ni d’horodateur, mais la parole et les gestes. Le chauffeur fixe son prix et l’annonce tout en conduisant. Commence alors la danse des pièces. Celles-ci sont transportées de mains en mains jusqu’à atteindre l’avant du véhicule pour atterrir entre celles du pilote. Les genoux s’entrechoquent, les coudes se frôlent, les mains se touchent : le contact avec l’autre est inévitable. On se touche : premiers liens.

En nous rendant à Cubaõ Expo, quartier underground de Manille, je fais la connaissance d’une dame. Elle est le genre de personne dont la belle âme transparait à travers le regard. Elle possède des cheveux courts grisonnant coiffés sous un épais serre-tête. Son nez est fin, surmonté d’une paire de lunettes à la monture dorée. Elle est assise à ma gauche. Originaire de la province sud des Philippines, elle accompagne sa belle-fille enceinte de quelques mois. Curieuse, elle me demande quelles sont mes origines, ce que je fais aux Philippines, combien de temps j’y reste. Elle connait l’ONG dans lequel nous travaillons. Je lis le scepticisme dans son regard : Are you building houses? Evidemment. Peu crédible, vu ma corpulence. L’une des missions principale de l’organisme dans lequel nous travaillons consiste à reconstruire des maisons pour sortir les familles des bidonvilles. Je lui explique alors que nous aidons l’ONG autrement qu’avec la force de nos bras. Son front se défroisse. Elle me demande mes premières impressions sur Les Philippines. A mesure que je fais l’éloge de son pays, je sens l’inquiétude monter en elle. Elle finit par me mettre en garde, me dire de faire attention à moi et de ne jamais, jamais trainer seule. Celle-ci veille aussi à ce que je cache mon appareil photo que je porte autour du cou sous mon tee-shirt et la hanse de mon appareil sous mes cheveux. Rien ne nous lie, mais le temps d’un transport, je m’attache à cette inconnue.
A peine le temps de lui dire au revoir, nous bondissons hors du jeepney. Je ne lui ai même pas demandé son prénom.

 

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J’ai toujours cette sensation de ne pas comprendre le monde qui m’entoure. Tout semble si anarchique et chaotique. Mais plus je me ballade dans les veines de cette ville, plus je commence à comprendre son fonctionnement. Je me confronte à elle et l’interroge. Pourquoi, comment? Je veux comprendre. Mais je prends conscience que pour cela je dois oublier. Oublier la vie d’où je viens. Comparer ce n’est pas comprendre.

 

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La surconsommation
Ça déborde. De partout. De manière inattendue. On tourne la tête et on tombe nez à nez avec un  » Mall ». Immense centre commercial à perte de vue. Royaume de la consommation à outrance. À l’intérieur, tout est nouveau. Mais pour autant le fonctionnement est le même. Même grande surface, mêmes rayons remplis, même profusion, même musique assommante, même caisse.

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Bayani Brew, crée il y a 2 ans, est une entreprise sociale de la Ferme spécialisée dans la fabrication d’IceTea Philippin. Fabriquée à base de produits locaux ( citronnelle, feuilles de patate douce ) cette boisson rafraichissante est un nouvel exemple de création de produits entièrement philippin. Nous entrons dans le local, accompagnées d’Elmar, employé de la firme. Ici, je comprends un des enjeux principaux de toute entreprise sociale : comment passer d’une création artisanale à une production commercialisable, de masse ? Une des problématiques de l’entreprise est de proposer un produit entièrement biologique mais qui possède pour autant des conservateurs. La solution : l’ajout d’acide ascorbique ou Vitamine C au sein du procédé.
L’ensemble de cet entretien est assez décalé et impromptu. Nous devons retirer nos chaussures et enfiler des chaussons d’intérieur. Je fais tout de même quelques pas pieds nus, le sol est en carrelage, frais, rafraîchissant. Pourquoi devons-nous changer de souliers ? Pour l’hygiène ? Ou pour marquer l’entrée dans un lieu spécifique ? Tout se passe comme si nous nous trouvions dans un lieu aseptisé, à cheval sur l’hygiène, rigide sur les protocoles. Pourtant les murs sont turquoises, les machines de laboratoires semblent d’un autre temps et surtout il y a ce jeune garçon assis. Qui nous tourne le dos, la tête dans un livre de karaoké. Et qui chante à cappela tout le répertoire des dernières chansons américaines d’une voix suraigüe.

Les philippins chantent. Partout, tout le temps.

La soirée FireCamp&Marshmallow est rythmée par un guitariste philippin à la voix magnifique. Véritable Jukebox vivant, il enchaîne chaque chanson avec enthousiasme. Incollable, il chante un répertoire incroyable : House of thé Rising Sun de The Animals en passant par Price Tag de Jessie J. Je chante à tue-tête avec lui. Ici je prends conscience que la musique rapproche et crée des liens. Langage universel, la musique déride et allège une situation en douceur.
Elle ouvre le coeur autant que les sens.

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Manille. Le 6 Mai 2014. 12h.

Nous venons d’atterrir. Notre aventure commence alors dès la sortie de l’avion. Douane, Visa, Bureau de change sont nos premiers contacts avec le peuple philippins. Le sourire de la douanière lorsque je lui tends une montagne de papiers, le policier qui tente de nous draguer, le vendeur d’eau qui s’inquiète de ma déshydratation, le contact se fait facilement.

Nous sortons de l’aéroport. La chaleur nous saisit, humide et étouffante.
Assises devant un duty free philippin, nous attendons.
Un van de La Ferme Enchantée arrive alors, avec à son bord, deux stagiaires français GK.

À bord du van de la Ferme nous traversons Manille. Après la chaleur, c’est la pollution qui nous saisit, âcre, forte et imprégnante. La ville ressemble à un amoncellement, une superposition d’éléments. Je ne comprends pas. Comment cette ville fonctionne ? Comment s’organise-t-elle dans ce désordre et ce chaos apparent ?

Le monde qui m’entoure habituellement est normalement très organisé. L’environnement que je perçois ici est au contraire totalement désorganisé expliquant peut être ce sentiment d’incompréhension.

La pauvreté est présente à chaque coin de rues. Au loin, on aperçoit des bidonvilles, des constructions sommaires, désorganisées. Comment tout cela tient ?

Énormément d’informations, de sensations nous parviennent. Après un voyage de 18h, et le décalage horaire, tout se mélange, et s’entrecroise.

Le voyage est chaotique. Le van se faufile à travers les multitudes d’éléments qui nous entourent : voiture, motos, vélos, enfants, ponts, feux rouges, feux verts, klaxons…  : la conduite est tellement périlleuse.

 

 

Après avoir passé la journée à Manille dans la maison de Gawad Kalinga, nous embarquons à bord du Van en direction de la Ferme enchantée. Il est 00h.
Peu à peu le van s’éloigne des lumières de Manille. Le trajet semble durer une éternité. Quelques bouteilles de la bière populaire « Red horse » tuent le temps. Les garçons nous font rires. Puis vient le silence. Celui de la timidité, de la fatigue, de la fin de journée. Seuls persistent le grondement du moteur, le claquement des roues percutant le relief de la route, le chant des grillons. La puanteur du fumier vient bientôt caresser nos muqueuses, annonçant L’Arrivée prochaine.
Ah et j’oubliais. Le ciel étoilé. Splendide. J’avais oublié comme il était beau. Il me rappelle que nous sommes si petits.

L’Arrivée. 2h du matin. Nous pénétrons Angat, petite ville située au nord de Manille. 55 332 habitants. Il s’agit de la ville où se situe la Ferme Enchantée.
Le Van nous dépose au « Sari Sari », sorte de petit commerce où les habitants de la ferme ont pris l’habitude de se rassembler pour faire la fête. Premier contacts. John, le gérant du Sari Sari nous fait un accueil chaleureux. Nous rencontrons aussi Jonathan, le frère de John. Jonathan a 18 ans mais il en parait 5 de plus. Il nous expliquera plus tard que la plupart des philippins font plus jeunes et qu’il est une exception, sans doute parce qu’il travaille dur. Il est cuisinier à la cantine de la ferme « Grassroots » depuis 2 semaines. Enfin nous rencontrons d’autres français de la ferme. Les premiers échanges sont timides, nous sommes épuisées. 32 heures que nous n’avons pas dormi.

Vient le temps de se diriger vers la ferme. Nous empruntons un petit chemin bétonné au milieu des champs. Nous marchons dans le noir. Notre guide s’appelle Edouard. Il est stagiaire à la ferme. Mais où allons-nous? Est-ce que les lueurs au loin que nous pensons percevoir sont celles de la ferme? Je ne peux m’empêcher de m’interroger sur le lieu. En réalité, dans tous mes fantasmes j’imaginais mon arrivée de plein jour, dans une ferme fourmillante. La réalité est bien éloignée : Il fait nuit et le lieu est désert. Nous franchissons le portail. La ferme semble entourée par un enclos. Entrons nous dans un autre monde? La première chose qui attire mon regard au franchissement du portail est un arbre décoré de luminaires en papiers colorés.

J’entre le dortoir des filles. Nous sommes séparées. Deux chambres séparées d’une fine cloison où sept à huit filles par « dorm » y sont déjà assoupies.

 

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La Ferme Enchantée reçoit une centaine d’employés de la firme philippine UniLab.
Unilab est la plus grande et la plus ancienne société pharmaceutique des Philippines. Pays en voie de développement mais qui souffre malgré tout d’un marché du médicament parmi les plus élevés du monde. Pourquoi ? Dans un premier temps, on apprend que dans ce pays l’assurance maladie ne rembourse absolument rien de frais médicaux. Ainsi, nous prenons conscience que la démarche de se soigner est complètement éloignée de notre propre culture. Alors comment se soigne-t-on ici ? Le problème principal est dû au fait que l’industrie locale est sous développée, menée et dirigée par des industrie étrangères. 95% des matières premières sont importées ( États-Unis, Canada, France…) Cela explique alors les prix exorbitants des médicaments : le prix du transfert, les taxes à l’importation détermine donc arbitrairement celui des médicaments philippins. Enfin du manque de concurrence locale, les multinationales peuvent décider librement les prix. Il paraît donc indispensable que le pays développe une industrie pharmaceutique locale afin de briser ce monopole.

 

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Ce constat se retrouve dans plusieurs discussions.

Nous rencontrons Edouard et Paul, deux stagiaires GK français étudiants à Agro ParisTech. Ils effectuent leur mission ici au sein de Gourmet Keso producteur de fromage. Leur objectif : développer la production de fromage frais naturels non transformés à base de lait de vache. On apprend alors une fois de plus qu’environ 90% des produits laitiers philippins sont importés : Nouvelle-Zélande notamment. Importé sous forme de poudre, il est ensuite transformé par des industries philippines. Une fois de plus, un fossé se creuse, ce produits si accessible en France est ici si peu présent. Uniquement 2% du marché est détenu par la production de produits laitiers à base de lait cru locaux. Avec Gourmet Keso on retrouve une des principales missions de la Ferme Enchantée : promouvoir l’entrepreunariat social afin de permettre à la population de subvenir par elle même à ses propres besoins.
Edouard et Paul élaborent une gamme de fromages frais et une future gamme de mozzarella. Ils seront bientôt amenés à effectuer des tests sur les bactéries lactiques de leur productions ainsi que sur la durée de vie de leurs produits. Ces contrôles microbiologiques seront un potentiel frein dans leur production s’ils n’ont pas accès au procédé. Ils devront demander à des laboratoires extérieurs d’effectuer certains de leurs tests. Nous nous rendons compte à quel point il serait dommage de déléguer ces démarches. Nous imaginons le potentiel en terme de créativité d’ajustement et de rapidité de faire ses expérimentations soi-mêmes.

 

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Le soir, nous allons finir la soirée près de la piscine en vue de discuter avec quelques villageois. Nous faisons la rencontre de Leslie, belle américaine d’origine philippine. Elle est professeur de théâtre originaire de San Diego. Nous lui expliquons notre projet à la ferme et nous apprenons que sa meilleure amie philippine est obligé de changer de ville pour son PhD en médecine. L’université dans laquelle elle étudiait n’a pas les moyens de posséder un laboratoire de recherche. Nous nous rendons encore compte d’un fossé : le peu de laboratoires de recherche aux Philippines expliquerait peut-être le manque d’innovation technologique et tous les problèmes induits.

 

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